Articles, presse

Verso 177

S’effacer, article de Jean-Claude Ribeyre, revue Verso n°177 – juin 2019

Le souffle suspendu à l’eau de ma bouche / je jette. // Le silence à mes lèvres courbées / je jette. // Rictus au coin des fossettes / je jette. // Le vide grignote la peau de mes murs. »
L’écriture d’Élodie Loustau joue sur la spatialité, sur les blancs de la page. Elle laisse respirer les vers tout en leur insufflant force et mouvement. S’effacer, c’est ne laisser aucune trace de notre passage, disparaître, ne plus peser et peut-être se libérer, s’affranchir du passé, « sortir des traces de nos morts ». C’est se résoudre à ne laisser que très peu de souvenirs et se confronter au vide absolu. « Je veux tomber. / Je veux tomber dans l’espace sans nom / Je veux tomber dans le temps sans trace / Je veux tomber dans l’absence de trace / Je veux tomber dans l’oubli de ta trace ».

Également musicienne, Élodie Loustau a créé le collectif hapax autour de projets pluridisciplinaires. Elle a jusqu’à présent peu publié, on attend avec impatience son prochain livre.

Portraits réalisés par l’artiste Mathieu Larregain à partir d’un extrait de S’effacer

J’ai mal à mes cernes, ce matin

 S’effacer, article de Mathieu Larregain – février 2018

S’effacer, Je l’ai dévoré, direct, arrêtant toutes mes lectures du moment. Je vais donc vous donner mon interprétation de cette œuvre, elle est probablement très loin de l’intention de l’auteur mais la poésie appartient au lecteur il paraît.
 
J’ai vu deux parties dans ce recueil, la première qui décrit une relation malsaine entre un artiste et son œuvre, cette dualité fusionnelle qui peut donner au monde l’impression que l’artiste est malade, triste, ou fou (ou les trois). J’écris malsaine, mais en y réfléchissant, c’est une relation amoureuse passionnée comme beaucoup, les termes peuvent paraître négatifs alors que je les lis plus comme une démonstration de puissance. Plus les termes sont moches et morbides, plus l’amour est puissant, ce n’est qu’une poésie excessivement sincère, certains écriront de leur moitié qu’ils/elles l’aiment à en mourir, ici, Élodie décrit l’amour comme une maladie, une addiction presque dangereuse. C’est beau.
 
La deuxième partie est pour moi une déclaration d’amour à un/une malade/maladie. Ça va choquer peut-être, mais ceux qui peuvent comprendront. C’est magnifique de lire ces lignes en imaginant le courage, l’imagination, la force qu’il a fallu rassembler pour les écrire. Je ne sais pas pour qui étaient ses lignes, je ne sais pas si elles étaient pour quelqu’un, mais en les lisant, j’ai vu quelqu’un, j’ai entendu de la musique, et je me suis vu danser (alors que je ne danse pas, même pas en rêve, c’était la première fois et c’était ridicule, mais j’ai apprécié) avec elle.
 
Tous ses mots sont une musique, mais comme elle est musicienne d’origine, j’imagine qu’il n’y a pas de secret, ce n’est pas une musique forcément entraînante, je l’ai trouvée un peu triste, mais c’était très beau. Merci Élodie, continue de continuer.